"[...] On nous a embobinées dès l'âge tendre, pour qu'on se tienne tranquilles, qu'on ne lève pas les yeux sur notre papa, qu'on ne pose pas la main sur le premier venu, ou sur notre meilleure ami (mais c'est une autre histoire...) pour qu'on attende l'unique, le pour de vrai, le pour la vie, qu'on se réserve pour lui avec toute notre fraicheur et notre bêtise intactes.[...] D'où vient qu'il est si doux d'imaginer LA rencontre ? C'est que parfois on se sent fatigué, c'est que, malgré la certitude, sans cesse éprouvée, que la solitude est notre seule tangible vérité, on espère quand même une main dans laquelle glisser la sienne, un amour sans négociations, l'idée de pouvoir être aimé d'un seul bloc que le temps ne réussirait pas à user, ou en tout cas, pas trop vite. Celui, celle, qui nous acceptera, qui nous pardonnera tout et même les crimes que nous allons commettre et même le mal que nous lui ferons et même de n'être rien de plus, rien de mieux que juste ce que nous sommes et qui n'ira pas en s'embellissant. Parce qu'on sent bien qu'on ne s'aimera jamais assez soi-même [...] Ce prince de nos contes d'enfant qui nous emportait au moment de nous endormir, chantant par la musique d'une voix aimée, ce n'est pas seulement un espoir, une idole, mais un dû. On nous l'a promis pour anesthésier nos douleurs juvéniles, comme les religions promettent de compenser les duretés de la vie terrestre par une autre, plus douce, dans l'après. C'était pour nous bercer et nous nous sommes laissé faire. Tant pis pour nous.[...]"

Méfie toi des fruits de Anna Rozen

:)

et puis :

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