Rédacteur en chef du quotidien de votre choix, vous écrivez un éditorial de première page dans lequel vous dénoncez des manifestations contemporaines d'intolérance.
Vous userez de toutes les ressources de la persuasion et de l'ironie.
"Mes chers frères, mes chères soeurs, l'heure est grave.
A l'autre bout du monde ou peut être à deux portes de chez vous, un adolescent s'apprête à commettre l'irréparable pour l'inavouable, le grand méchant tabou, j'ai nommé l'homosexualité. Bien sur que oui, on prendra soin de camoufler les raisons initiales du jeune homme après le drame. Et la famille, honteuse et accablée ira raconter à qui veut bien l'entendre, comme pour se déculpabiliser, la détresse de son pauvre enfant, le spleen infernal dans lequel il était plongé depuis bientôt des mois.
Vous savez, les aléas de la vie, la crise d'adolescence, tout ça... Il en faut peu de nos jours, avec ces armes qu'on trouve en vente partout sur Internet, les anti-dépresseurs de maman dont l'armoire à pharmacie déborde et la corde à sauter de la petite soeur, innocemment jetée dans un coin du garage...
Pourtant il avait l'air heureux, il dessinait des arcs-en-ciel sur les murs de sa chambre...
Alors oui, la réputation de la misérable famille sera bien protégée, l'image restera lisse et presque aussi impecable qu'avant. Le secret bien gardé, le monde continuera à tourner.
Et l'histoire arrive partout et ce, depuis bien trop longtemps déjà.
Le scandale avait émergé dans les années 70. Epoque "peace and love" : on se drogue, on court nus dans les champs en jachère, on fait l'amour à n'importe qui. Apparition fracassante du Sida dans les milieux homosexuels. Des milliers d'hommes atteints, malades, mourants. Ca sent l'horreur à des kilomètres à la ronde et pourtant, on fait comme si rien ne se passe. Dans les familles, on plaint le pauvre cousin, mourant à petit feu d'un cancer au fois détecté trop tard. Et ça dure, ça dure encore, des années même. La lente hypocrisie se noie dans son propre venin.
Les enfants grandissent, on finit par leur confier, pétrifiés, le terrible secret. Petit à petit, les opinions se créent, les "grands esprits" se rencontrent : on pense ce qu'on veut mais jamais ! Oh grand jamais, on en parle. Ils font ce qu'ils veulent à San Francisco, pas de ça chez nous !
Charles Aznavour et Renaud chantent la tolérance, rien n'y fait. Les "provinces coinçées" restent ce qu'elles ont toujours été, prônant au mieux l'indifférence, au pire, le déni total de la différence. Entre racisme et homophobie, il ne fait pas bon vivre en France..
Des rangées de petits soldats, martelant, décérebrés, l'hymne de la pauvreté mentale, prennent place dans les rangs de notre société.
Il en faut peu pourtant, pour faire évoluer les mentalités. Certains essayent : On colle des affiches dans Paris, des couples homosexuels qui s'embrassent amoureusement, rien de bien provocant. Les soldats ripostent :
"je ne veux pas que mes enfants voient ça !" qu'ils disent.
Et en Afrique, au même instant, des hommes sont tués publiquement. Motif ? Un vol quelcquonque. En réalité, c'est une histoire d'amour ou une aventure avec une personne du même sexe qui leur a valu la vie. Je suppose que vous ne le saviez pas. C'est si dur de percer les mystères d'une société aussi tristement hypocrite que la nôtre. On croit accepter l'autre comme il est, on jure qu'on acceptera tout, par amour du prochain. Et quand le vice apparaît, criant de vérité, on sort les croix et on crie au chatîment, on pousse le triste condamné à la peine infernale.
Pendant ce temps, Brandon et Pamela flirtent à la télévision, la pornographie abonde dans les librairies et les supermarchés, de grands industriels courrent au bois de Vincennes. Tout de même ! Ce n'est pas bien choquant !
Le monde si lisse et si parfaitement uniforme dont vous rêvez les yeux mi-clos n'existe pas. Il vous faudra trébucher sur la différence aussi longtemps que vous vivrez. Cesser de voir les autres comme des obstacles, c'est avançer. Car avançer ne se fait pas sans les autres. L'inavouable de certains les laisseront sans peine mais d'autres continueront à mourir dans le silence général. C'est pour cela que nous avons choisi de dédier ce numéro à l'homosexualité. Vous pourrez retrouver les personnages célèbres qui ont fait leur coming-out en page 7 et une interview de Johnny Halliday qui vous expliquera pourquoi il a voulu officialiser sa liaison avec Patrick Poivre d'Arvor, le célèbre présentateur du journal télévisé de TF1, en page 12.
Bonne lecture et surtout, n'oubliez pas : assumez vous !
Par paranoia | Avant | Vendredi 15 Février 2008, 13:38 | Après | Actualités | 5 commentaires
par Twi, le Vendredi 15 Février 2008, 20:54
Répondre à ce commentaireGénial. Bravo, je suis de l'avis de Paola moi aussi je t'aurais donné plus de points, c'est très bien écrit et bien ficellé ^^
Gros bisouus :)
Commentaires
1 -par Paola, le Vendredi 15 Février 2008, 19:38 Répondre à ce commentaire