Non, bien sur que non, on ne nous laisserait pas mourir. Pas à notre âge, pas dans ces circonstances. On nous laisse là sagement pour les vivants, pour faire décoration dans les fêtes de famille.
On nous laisse boire du champagne en souriant mais on nous envoie nous coucher tôt, je crois qu'on ne fait pas bien la différence entre grandir et se faner. Alors doucement se fondre avec le papier peint fleuri derrière nous, doucement se fondre en sourires arrangés, en regards affaiblis mais heureux. Non ?
Et puis s'assombrir dans le creux, quand la nuit tombe trop vite et parce que les hivers sont trop froids. Faire semblant de mourir, comme ça, juste pour voir. Juste pour essayer. Parce qu'il ne faut pas mourir sans avoir fait tout un tas d'expériences.

Non, bien sur que non, on ne nous laisserait pas mourir.
C'est bien pour ça qu'on nous serre dans les bras, comme une dernière fois, qu'on nous abandonne trop tard et trop longtemps, dans le silence glacé des nuits où l'on s'ennuie toujours un peu trop fort. Les insomnies ne nous laissent pas vivants bien longtemps, elles s'étalent, et le jour devient gris, gris du sommeil perdu.


Non, bien sur que non. A quoi bon ?


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